#MeToo : La Parole est à la Victime

Le Harcèlement en Question

Quel que soit le milieu, nous avons toutes déjà été confrontées à un ou deux porcs, à ces hommes qui se croient tout permis en vertu de leur statut ou simplement parce qu'ils possèdent un pénis.

Le débat a quitté les studios californiens pour descendre dans la rue: les prédateurs sexuels ne sont pas que dans le cinéma. Ils sont partout, dans tous les milieux. Les femmes osent enfin parler des agressions dont elles ont été victimes et du harcèlement ordinaire et mondain, presque banal.

Pourquoi maintenant ?

Beaucoup l'ont dit et continuent de le dire sur les plateaux télés et dans la presse: "tout le monde savait". Mais alors pourquoi maintenant ? Et pourquoi a-t-on laissé un puissant prédateur sexuel agir pendant plus de 20 ans ? Pourquoi n'a-t-on rien dit ?

Weinstein était l'un des hommes les plus puissants d'Hollywood, mais désormais sur le déclin, c'est un Harvey affaibli qui a été livré en pâture aux médias américains et internationaux.

Beaucoup sont ceux qui étaient au courant mais qui n'ont rien dit et nombreuses sont celles qui ont été victime, en ont parlé et ont été sommées de se taire.

Au-delà des viols et du témoignage des artistes de renommée internationale; c'est la question de l'abus de pouvoir et du harcèlement qui a pris le pas sur le scandale. Ce sont toutes les femmes qui se sentent concernées et c'est une grande partie d'entre-elles qui a décidé de parler pour dénoncer les violences qu'elles subissent, parfois au quotidien.

Harcèlement et abus de pouvoir: toutes victimes.

Le harcèlement ordinaire, celui que nous vivons toutes: un "Hey Mademoiselle!" crié au détour d'une rue, un regard déplacé parce que l'on porte une jupe courte, une remarque graveleuse d'un collègue de boulot parce qu'on a un décolleté m'a toujours mis hors de moi. De quel droit ces hommes déversent-ils leur trop plein de testostérone et de machisme sur nous ? De quel droit considèrent-ils que nous sommes des objets ?

Combien de temps l'hystérie médiatique autour de ce sujet va-t-elle durer ? Les initiatives pour dénoncer les porcs et le harcèlement de rue, les violences contre les femmes ne sont pas nouvelles, et elles sont nombreuses. Je pense par exemple à Paye ta Shnek, le tumblr qui rassemble des témoignages de femmes sur le sujet. Allons nous rapidement retomber dans le mutisme et la protection des hommes de pouvoir ?

Il y a fort à parier qu'au-delà des grands coups d'éclats comme le retrait de la Légion d'Honneur pour Weinstein et des déclarations "scandalisées" de certains; il n'y ait rien qui soit fait et que les mentalités ne changent pas. Beaucoup d'hommes de mon entourage disent prendre conscience de l'ampleur du problème et ne pas comprendre comment certains hommes peuvent avoir ce comportement. Très bien. Malheureusement, ce ne sont pas ceux dont la mentalité doit changer et ce n'est toujours pas eux qui sont victimes.

Un des grands problèmes lorsque l'on parle de harcèlement, et on a souvent tendance à l'oublier; particulièrement dans des périodes de crise sur le sujet, comme c'est le cas ici: Nous n'avons pas toutes et pas tous la même définition ou la même perception de ce qu'est le harcèlement.

Me faire héler à plusieurs reprises dans la rue par une bande de mecs, c'est pour moi du harcèlement et je le vis comme une intrusion dans ma tranquillité et dans mon espace personnel. Pour d'autres, le même moment est vécu comme quelque chose de normal, voire une reconnaissance de leur beauté physique. Le harcèlement commence là où le consentement meurt: Drague ou Consentement ? par Paye ta Shnek. C'est en cela qu'il est absolument nécessaire d'entendre la parole de chacune, de ne pas juger les récits, de comprendre que chaque situation est différente ET problématique. Et surtout de ne pas jeter la pierre sur celles qui n'osent pas parler, sur celles qui se taisent par peur de représailles ou tout simplement parce qu'elles considèrent que c'est une réalité qu'elles ne peuvent pas changer.

Libérons-nous - #MeToo

Parler de harcèlement et être entendu est libérateur; en tant que femme, j'ai depuis quelques jours l'impression que mon énervement est enfin compris et entendu; que la voix de celles qui ont subi des violences ne se perd plus dans le vide. Que l'on peut enfin discuter du sujet, crever l'abcès.

Malgré mon scepticisme, je veux croire qu'il y aura des conséquences sur les mentalités; que certains se rendront enfin compte qu'il n'est pas normal que les femmes doivent encore subir le poids de cette violence, qu'elles ne soient pas écoutées lorsqu'elles parlent de harcèlement, qu'elles doivent accepter d'être confrontées quotidiennement à des remarques liées à leur sexe. Que NON, ce n'est pas normal.

S'il n'y en a aucune, il faudra encore se battre pour être entendues, mais; plus libres nous saurons crier plus fort.